▒█░ Algérie ma déchirure : ░█▒
Auteur : Behja Traversac
Illustrateur : Catherine Rossi
Editeur : CHÈVRE-FEUILLE ÉTOILÉE
Ebook : 9.99 €
Broché : 19.00 €
Résumé : Alger, Oujda, Oran, Portsay… une ballade qui nous transporte dans un voyage insolite. Les personnages peu communs qui ont jalonné la vie de l’auteure, appartiennent à une frange de la société rarement évoquée par les historiens ou les sociologues. C’est dans une langue légère, poétique, que Behja Traversac ouvre, ici, les voies de l’intime lorsqu’il tend à l’universel. Illustrés d’aquarelles en couleur de Catherine Rossi qui a longuement arpenté cette terre, ces textes nous parlent d’une Algérie empreinte d’ombres et de lumières, tendre et violente, dans laquelle se tressent passé et présent.
Alger, de mes enfants, mes amours, dont tu seras toujours l’ancre. Tu fus la nacelle de leurs premiers pas et de leurs premiers mots. Rien ni personne ne peut effacer leurs noms de tes rues. Ni les ostracismes, ni la bêtise, ni les égratignures… ni le temps, ni l’éloignement. […] Pourtant, c’est chez toi qu’ils sont passés au-delà des murs du racisme. C’est toi qui leur as donné ce regard ample d’enfants du monde qui ne voient ni les couleurs de peau, ni les identités figées, ni les idées sans retour. C’est en toi qu’ils ont acquis la force de l’interrogation, la force du doute, la force de l’amour des autres. Ils t’aiment, Alger, ne les abandonne pas.
■━■━■━■ Mon avis : ■━■━■━■
Je n’ai pas connu Alger, mais j’en ai beaucoup entendu parlé. De ses magnifiques rues, de l’ambiance qui régnait dans le temps. Ses couleurs, ses odeurs, son marché aux fleurs et ses bougainvilliers. Des souvenirs qui m’ont été transmis avec une belle nostalgie. C’est ce qui m’a fait choisir cette lecture. Je pensais que l’auteure me parlerai de la même déchirure. Et même si cela ne fût pas le cas, cette autre déchirure m’a pourtant embarquée et fait ressentir aussi beaucoup d’émotions se superposant même parfois, à celles qui m’ont été contées.
Des instants de vies, des poèmes… Algérie ma déchirure est un hymne à ce pays, à ses habitants. A ces lieux que l’auteur nous conte et nous raconte avec son cœur. Un voyage plein de senteurs aux fragrances du jasmin, aux belles couleurs des aquarelles de Catherine Rossi qui subliment ce livre et le rendent palpable et vivant.
Ce sont les gens à histoires, qui souvent font l’Histoire.
Behja Traversac nous ouvre plusieurs portes sur ses souvenirs sans cependant nous les livrer comme une autobiographie. Certes, elle nous offre des instants de vie, mais elle les effleure du bout de sa plume poétique pour les laisser tout à notre imagination. Elle dévoile, puis se voile… Jusqu’à ce qu’un autre souvenir fasse son apparition et elle repart, habitée par sa mémoire qu’elle laisse fuser sur sa page avec des mots qui formeront un tout. Qu’importe dans quel ordre elle va les partager avec nous, qu’importe de qui, et de quand elle parle, ou de la manière dont elle va nous les conter. Que ce soit en proses, forme de poèmes, au travers d’aquarelles signées Catherine Rossi, ces courts instants sortis tout droit de la mémoire de son cœur ou de longues balades, auront tous une importance et une valeur émotionnelle très forte. C’est beau, c’est juste, c’est touchant. Parfois… désolant ou encore mélancolique. L’auteur nous offre un beau panel de sentiments dans un milieu, un pays et à des époques où il n’était pas si facile d’être une femme… Et qui ne l’est toujours pas. Un pays dont on s’arrache, s’exile, mais dont on ne part vraiment jamais tant il reste ancré dans nos cœurs.
Entre les déchirures, les joies, la beauté d’un pays tendre et violent à la fois. De ses illusions, désillusions, possessions et dépossessions et de ses souffrances…. Behja Traversac nous livre ses souvenirs et se délivre par les mots. Un tas de mots mis sur papier qui deviennent alors une histoire. Son histoire familiale. Celle de son pays, de sa mère, sa grand mère. Celle de son père, ou encore de certaines rencontres au travers de qui, et selon de qui elle parle, nous plonge dans l’Histoire en nous emportant dans un voyage peu commun avec des codes de familles et de certaines conditions vie. Par tous ces petits fragments de souvenirs, l’auteure nous parle de l’Algérie comme une entité à part entière, de vie, de survie, d’indépendance et de guerre. Mais aussi de nombreux moments de bonheurs. Petits ou grands… ils comptes et se racontent.
Mais ce que je retiendrais le plus de ce livre, sera sans aucun doute, son fil conducteur qui a été pour moi, les révélations sur la condition féminine dans ce pays et le combat qu’elles mènent pour leur indépendance depuis des décennies. Ces mêmes femmes très présentes et engagées lors de la guerre d’indépendance et qui peinent à faire entendre leurs Voix.
Au commencement était la voix, pas le mots, la voix. (Adonis)
Entre l’ombre et la lumière. Entre les poèmes qui racontent ce qu’on ne peux raconter et qui deviennent alors eux aussi la Voix que beaucoup taisent, L’algérie ma déchirure peut aussi se voir comme un hommage à ces femmes. Les soumises et les insoumises. Les militantes et les combattantes. La femme d’hier et celle d’aujourd’hui avec le grand espoir qu’un jour leur voix porte assez, et qui, comme celle de la mère de Behja Traversac malgré les obstacle saura dire NON.
Un grand merci à La Masse Critique Babelio pour l’envoi de ce service presse papier qui est d’une grand qualité. Merci à l’auteure pour ce magnifique voyage livresque ainsi qu’à Catherine Rossi pour toutes ses magnifiques aquarelles qui magnifient les pages et dont je ne me lasse pas de les apprécier.
■━■━■━■ Extrait : ■━■━■━■
Alger de ma grand-mère du chemin Fontaine Bleue. Elle incarnait pour moi ces personnages féminins de Delacroix. Avec ses foulards à franges, et ses haïks en soie et sa passion indestructible pour Alger,
elle, une fille du Sud. Happée par Alger, elle s’est « citadinisée » de façon parfaite, sans affectation et sans faute de goût. Elle s’est coulée dans tes vêtures, Alger, comme on se coule dans un moule qui a toujours été fait pour soi. J’aimais les visites chez elle qui nous contait Alger dans cet accent mélodieux du Sud que tu n’as pas réussi à lui voler. Je me souviens de l’émerveillement que j’avais quand on allait la voir en parcourant lentement « el boulevarrd» comme elle disait. On dominait la ville et la baie et à chaque pas, Alger l’impudique, Alger l’irrésistible, tu réclamais notre admiration. Nous te la donnions sans retenue.
Il régnait chez ma grand-mère une atmosphère que je ne saurais définir. Une espèce de va-et-vient entre la vie urbaine, sédentaire, policée, et la vie nomade, échevelée comme vents d’oasis, s’esclaffant dans ses accents chantants, longs comme des interrogations sans fin… Aujourd’hui, je me demande comment elle arrivait à marier avec une telle sérénité et une telle harmonie,ces deux aspects de sa personne, de son passé et de son entourage. Deux mondes différents qui se croisaient, coexistaient, avec l’air de ne s’affronter jamais.

Algérie, ma déchirure : Fragments de vie

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